C'est à l'âge de 12 ans que j'ai commencé à prendre des photos. Je n'ai pas cessé depuis. Mais ce n'est que récemment que j'ai décidé qu'il était temps de montrer mon travail. Cette décision ne s'est pas imposée tout de suite puisque le processus intérieur de prise de vue me procurait et me procure toujours autant de satisfaction que le résultat final, extériorisé. Il fallait cela dit, que ma démarche évolue, et en ce sens, extérioriser mon travail me semble aujourd'hui être une avenue prometteuse.  Je dois aussi admettre que c'est seulement à la fin de la quarantaine que je sens que j'ai atteint le niveau de maturité qui me permet d'assumer pleinement cette extériorisation.

Je suis fasciné par toutes ces choses que nous percevons mais que nos mots peinent à définir. Nous sommes capables par exemple, de reconnaître l'harmonie, mais il nous est très difficile de la définir. Il en va de même d'une émotion brute ou d'un paysage commun dont on découvre la beauté parce qu'on a pris le temps de regarder. C'est pour vivre l'expérience de l'indicible et en proposer une interprétation que je fais de la photographie. 

La majorité de mes photos sont prises en utilisant un temps de pose très long. J'aime l'idée qu'elles sont faites de temps, de lumière et de mouvement. Le temps permet le mouvement et la lumière le révèle. Quand on leur laisse le temps, les objets en mouvement laissent des traces sur le support photographique. C'est lorsque ces traces entrent en résonance avec les lignes et les formes des objets fixes qu'une photo naît.  Cette résonance qui semble être le fruit du hasard est fascinante. Pour la percevoir, il est indispensable de remettre en cause tout besoin de contrôle et apprendre à être juste là, disponible.

Aussi, je suis en quête de lenteur. J'ai choisi un style photographique qui me permet de ralentir. Cela commence par le choix d'une destination au gré du vent, des nuages ou des marées, le rituel de préparation de l'équipement le matin d'une sortie, l'arrivée sur le site, la contemplation sans a priori du paysage qui petit à petit m'imprègne, l'émergence d'une idée, l'installation du trépied, la composition, le calcul du temps de pose, l'installation des filtres, le déclenchement, l'attente, l'examen du résultat, et le constat invariable qu'il faut simplifier. 

Simplifier est le but. Ma démarche photographique consiste à simplifier pour ne préserver que l'essentiel. L'essentiel est beau. Trouver le beau c'est atteindre l'essentiel. 

K.